Togo/ Couvre-feu: Le journaliste Michel Akoueté bien battu par les forces de l’ordre

« Je faisais partie de ceux-là qui défendaient encore ces forces. Je soutenais qu’il était impossible qu’un des éléments de la force spéciale contre le covid-19 commence par tabasser les honnêtes citoyens sans rien leur demander à l’avance. Je viens de voir la réalité en face. Et je l’ai vécue de façon amère, très amère je vous dis« . Tels sont les propos de Michel Akoueté, journaliste au quotidien Forum de la Semaine, victime de bavure policière devant son portail dans la nuit de mercredi à jeudi.

Ce comportement aussi bien inexplicable qu’intolérable, qui s’apparente à un règlement de compte, est dénoncé et condamné par la presse qui n’a d’autres choix que de faire front commun contre ces genres de pratiques, car si rien n’est fait dans le sens de les décourager, elles auront de beaux jours devant elles et pourront toucher n’importe quel professionnel des médias.

Depuis le début du couvre-feu, certains éléments des forces de l’ordre commis à cette tâche se sont distingués par des comportements peu recommandables qui creusent davantage le fossé de la méfiance et du désamour entre les forces armées et la société civile.

Ces quelques forces de l’ordre se comportent comme des hommes colériques, grincheux et irascibles. Leur comportement sur le terrain font croire aux Togolais que nos autorités ont une main de fer dans des gants de velours avec la fierté d’opprimer ceux qu’ils dirigent. A quoi cela est due? Manque de professionnalisme ou carrement zèle?

Bien que le Général Yark Damehame déplore et dénonce publiquement ces comportements, sur le terrain les bastonnades continuent. Est-ce le ministre de la Sécurité qui est impuissant face à la situation ou alors c’est son discours qui a du mal à passer auprès de ses éléments.

Voici in extenso le témoignage du confrère.

« Le triceps et le quadriceps, ces deux (2) muscles de ma cuisse gauche n’ont jamais eu un tel volume sans oublier les autres traces sur des parties de mes membres inférieurs (fesses, cuisse droite…)« 

« Les années d’exercices physiques, de musculature et même les coups reçus lors des multitudes matches de football et de basketball ne m’ont jamais permis d’avoir un tel volume musculaire. Il a fallu que je passe moins d’une minute devant la patrouille de la force spéciale contre le covid-19, force mise en place pour assurer le couvre-feu en vue de limiter la propagation du virus pour avoir un tel résultat. Ceci après plus d’une dizaine de coups répétés de cordelettes reçus de certains éléments le mercredi 15 avril aux alentours de 21 heures devant la maison où j’habite actuellement« 

La scène s’est produite dans le quartier Eda Oba à Lomé.

Qu’est ce qui s’est réellement passé ?

Il sonnait presque 21h quand je suis sorti pour uriner. J’ai vu que notre portail n’était pas encore fermé. Je voulais donc le faire avant d’aller dormir. Mais comme il faisait chaud, je suis sorti et resté collé au mur du portail, histoire de prendre quelques minutes d’air. 

Une jeune fille sortit de la maison d’en face pour uriner elle-aussi. Contrairement à moi, cette dernière était sortie pour le faire contre le mur de leur maison de location. A peine baissée pour se satisfaire que deux éléments de la patrouille à bord d’une moto s’arrêtèrent devant elle avec les cordelettes à la main pour la passer à tabac. La fille criait et leur expliqua qu’elle vient juste de sortir pour uriner. 

Le temps pour moi de faire un pas en arrière pour rentrer chez moi, deux autres à bord d’une autre moto arrivèrent et m’interpellèrent. Ne voulant pas courir pour créer peut-être des problèmes à l’ensemble de mes colocataires, ils se sont rués tous sur moi. Et un parmi les 4 éléments me prit par la main et me déplaça de notre portail. 
Ils m’ordonnèrent de me coucher par terre. Je leur demandai ce que j’ai fait de mal. Pendant ce petit temps de discussion, je recevais déjà des coups par-ci, par-là.

Je me suis senti en danger. La seule option pour moi était de faire juste un pas pour rentrer et me sauver. Un parmi les 4 éléments, leur chef sûrement,  parce que n’ayant pas de cordelette à la main, a bloqué notre portail et m’a poussé de force vers les 3 autres qui continuaient sans cesse de me donner des coups. 

Ma chance est que tous les  coups  reçus étaient au niveau de la jambe et du pied. 
Ce qui m’a permis de me débarrasser finalement d’eux est qu’un gars était sorti de la maison d’en face, la même maison où était sortie la fille qui a failli se faire tabasser; ce gars en question voulant voir ce qui se passait à la devanture. L’agent qui m’a bloqué l’entrée a couru vers lui pour l’arrêter. C’etait la seule occasion que j’avais pour me sauver. Ce que j’ai réussi d’un geste brusque et j’ai pu rentrer chez moi.

Je vous assure que tout le sale moment que j’ai passé avec ces 4 agents, je n’ai en aucun moment prononcé un mot grossier qui pouvait embêter qui que ce soit. Les seules phrases que je répétais étaient qu’est ce que j’ai fait? Je suis juste à la devanture pour prendre un peu d’air. Pourquoi vous me frappez ?
 A l’heure où je fais ce témoignage, j’ai de la peine à marcher correctement puisque la douleur est toujours persistante à ma jambe gauche. 

Voilà la mésaventure que j’ai eue avec la patrouille contre le covid-19 le mercredi 15 avril.
Je me demande juste qu’est-ce que ces agents ont compris des gestes barrières en me tenant par la main comme un voleur. N’est ce pas le moment de respecter scrupuleusement les gestes barrières pour éviter la propagation du virus comme le disait le chef de l’Etat dans son adresse à la nation?

A supposer que j’ai le covid-19 ou que l’un des éléments l’ait peut-être choppé dans cette sale besogne à tabasser les honnêtes citoyens ? Que faisons-nous alors au juste pour limiter la propagation de la maladie?

Je ne serai pas en train de contaminer mes proches surtout ma femme avec qui je partage le même lit ? Ces 4 éléments de la force contre le covid-19 ne seront-ils pas en train de faire autant ?

Je faisais partie de ceux-là qui défendaient encore ces forces. Je soutenais qu’il était impossible qu’un des éléments de la force spéciale contre le covid-19 commence par tabasser les honnêtes citoyens sans rien leur demander à l’avance. Je viens d’avoir la réalité en face. Et je l’ai vécue de façon amère, très amère je vous dis.‎ »

Voilà racontée la mésaventure de notre confrère. Le Général Yark Damehame est une fois de plus interpellé. Il est aujourd’hui plus que nécessaire de remettre dans le rang ces « brebis galeuses » auteurs de comportements qui n’honorent pas les forces de l’ordre et qui tendent à remettre en cause le bon travail abattu par le ministre de la Sécurité et de la Protection civile.

NPA

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