INTERVIEW: « Nous allons dorénavant poursuivre nos engagements vis-à-vis des autorités portuaires, avec la même diligence et avec de nouvelles capacités d’investissements » Charles Kokouvi Gafan
Grâce aux expériences acquises à la tête de Bolloré Africa Logistique, le Togolais Charles Kokouvi Gafan ne manque pas de charisme. L’homme a désormais de la substance et reste sans doute passionné. Son audace fait de lui aujourd’hui le PDG de la nouvelle entité, Africa Global Logistics Togo. Jeune, dynamique et humble, l’ancien PDG de Bolloré Africa Logistique force admiration. Charles Kokouvi Gafan dévoile dans cette interview les enjeux de cette nouvelle donne.
Jusqu’au 30 mars, vous étiez le PDG de Bolloré Africa Logistics Togo, vous êtes dorénavant celui d’AGL Togo. Quelles conséquences de changement d’entité ?
Charles Kokouvi Gafan: En tant que société autonome au sein du groupe MSC, AGL continuera d’assurer ses activités, sans incidence pour les autorités concédantes pour nos clients. Cette évolution n’aura donc aucune conséquence sur notre organisation, pas plus que sur les contrats de travail de nos 900 collaborateurs togolais. Il s’agit d’une véritable opportunité pour AGL, puisque cette opération nous permet de disposer de capacités et de ressources supplémentaires pour assurer notre développement, tout en répondant efficacement aux défis logistiques auxquels est confronté le continent. AGL va tout mettre en œuvre pour respecter ses engagements contractuels envers l’État, avec l’ambition que notre plateforme portuaire soit en mesure de délivrer les meilleurs services à tous nos clients armateurs.
Quel bilan peut-on tirer de la longue présence de BAL sur les quais du PAL?
Le groupe Bolloré a indéniablement donné une impulsion forte au développement des activités portuaires de Lomé en particulier en matière de productivité qui ont permis à l’interface portuaire togolaise d’être l’une des toutes premières de celles situées le long de la côte ouest-africaine. Depuis son arrivée à Lomé, BAL a beaucoup investi dans la consignation maritime ou le dédouanement, le fret aérien, ou encore les capacités d’entreposage à l’intérieur comme à l’extérieur de l’enceinte portuaire, pour faire du port de Lomé un hub logistique régional. Nous allons dorénavant poursuivre nos engagements vis-à-vis des autorités portuaires, avec la même diligence et avec de nouvelles capacités d’investissements qui nous permettront d’améliorer encore notre productivité et notre qualité de service.


Les deux terminaux à conteneurs du PAL restent gérés par des opérateurs différents, mais qui appartiennent désormais tous deux au même groupe MSC. Ne risque t-on pas d’aboutir à un monopole de fait sur les quais loméens?
Il faut déjà insister sur la complémentarité de ces deux terminaux. Celui géré par LCT est un hub de transbordement, uniquement destiné aux navires MSC, quand Togo Terminal reste concentré sur les trafics liés à l’import et à l’export pour le marché togolais et les pays de l’hinterland. Nous travaillons dans le cadre de concessions de service public, selon des conventions qui définissent très clairement les règles d’exploitation du terminal à conteneurs que nous gérons. Le principe d’égalité d’accès des clients à nos services ainsi que les règles tarifaires sont donc rigoureusement encadrés. Nos tarifs sont établis en toute transparence vis-à- vis de l’Autorité portuaire, avec l’impératif de garantir la compétitivité du port de Lomé face à la concurrence sous-régionale.

Le PAL a fait son entrée en 2021 dans le classement des 100 premiers ports mondiaux, établi chaque année par la Lloyd’s List.
Qu’est-ce que cela signifie?
Cela montre surtout l’importance des progrès réalisés en matière d’investissements portuaires, ainsi que les efforts des opérateurs pour moderniser leurs installations, en cohérence avec les objectifs des autorités publiques togolaises. Aux côtés des autres acteurs logistiques de la place, AGL a contribué au renforcement de la position stratégique de Lomé en améliorant la desserte des pays voisins enclavés, dont les économies se sont développées. Cette entrée du PAL dans le classement « One Hundred Container Ports » est une reconnaissance de tout le travail réalisé.
Comment ont évolué vos activités ces dernières années et quels sont les principaux projets d’AGL à Lomé?
Après une année 2020 évidemment marquée par les effets de la pandémie, 2021 a connu un rebond avec une croissance des volumes de conteneurs de +7% [plus de 1,96 mil- lion d’équivalents vingt pieds (EVP) en 2021, selon la Lloyd’s List]. L’année dernière a, en revanche, connu une nouvelle contraction, à la suite du ralentissement de l’économie mondiale provoqué par la guerre en Ukraine. Il est toutefois important de souligner que les volumes conteneurisés de 2022 restent supérieurs à ceux enregistrés en 2020. Aujourd’hui, notre stratégie vise à valoriser notre position à travers plusieurs initiatives, depuis l’amélioration de notre productivité jusqu’au renforcement de notre politique de gestion des ressources humaines. La mise en œuvre du label Green Terminal, certifié par Bureau Veritas, est également un enjeu majeur en matière environnementale et sociale pour nos activités portuaires à Lomé.
Quelles sont les perspectives
de développement de votre terminal, liées en particulier à la desserte de l’hinterland?
La densification du commerce africain, qui passe par l’amélioration de la connectivité des pays de l’hinterland, se concrétisera via l’instauration de la Zone de libre-échange et continentale africaine [Zlecaf]. Dans ce cadre, le Togo s’est engagé dans un vaste programme de construction d’infrastructures routières que nous accompagnons avec notre propre plan d’investissements et nos activités, afin de soutenir les perspectives de croissance durable du pays. Nous souhaitons ainsi renforcer nos connexions avec les pays voisins, en participant à la mise en place de corridors commerciaux. Nous entendons également mettre à profit notre réseau logistique pour faire face à une demande accrue, tout en investissant aux côtés de nos 1ers partenaires et grâce à notre nouvel actionnaire dans des capacités portuaires et logistiques supplémentaires. FIN
Source: Jeune Afrique