Niger, Mali – Sur fond de dérives autoritaires les juntes
au pouvoir
Entre le marteau de la vie chère et l’enclume de l’insécurité
Terriblement en proie au phénomène de la vie chère, au chômage endémique et l’escalade de l’insécurité, le Niger fonce vers un effondrement certain, sous l’égide d’une junte au pouvoir, de plus en plus contestéé jusqu’au sein de l’armée pour sa méthode de gestion approximative des affaires publiques. Idem pour son voisin du Mali. Incapacité de résistance aux groupes armés, prolifération des pots-de vin, exactions militaires contre les populations civiles…, tels sont notamment, les griefs qui s’accumulent contre les nouveaux maitres qui croupiraient sous l’influence de l’ex président nigérien Issoufou.
Systématiquement, les groupes armés tels que, l’Etat Islamique au Grand Sahara (EIGS) et le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (JNIM) ont fait de la zone des trois frontières un terrain de prédilection où non seulement ils violentent et dépouillent les habitants de leurs biens, mais aussi, les obligent de payer la ‘’Zakat’’. Au même moment, les forces de défense et de sécurité (FDS), se révèlent impuissantes face aux assauts incessants des islamistes. Au moyen des embuscades et des engins explosifs artisanaux, ces derniers paralysent les militaires et les policiers à qui ils infligent d’énormes pertes.
Un mois de juin particulièrement meurtrier
Le cas du JNIM qui ne cesse d’administrer des revers à une junte incapable d’assurer la protection de ses soldats et des populations civiles se trouvant également dans le collimateur des Jihadistes, en est une illustration éloquente.
Sur ce point, le mois de juin marqué par une augmentation en volume et intensité d’attaques menées par la cellule de Torodi, a été particulièrement meurtrier.
Au niveau de la frontière nigéro-burkinabè, des offensives de grande ampleur du JNIM se multiplient. Déjà le 20 mai 2024, une attaque menée à Boni au Niger a fait une cinquantaine de morts dans le camp des FDS. Entre le 13 et le 14 juin, d’autres attaques à Mansila au Burkina Faso ont provoqué la mort d’environ 150 membres des FDS. D’autres encore effectuées à Tassa le 22 juin et à Gotheye, le 25 ont coûté la vie respectivement à une vingtaine et une quarantaine d’éléments des FDS.
Le 8 juillet un soldat nigérien a trouvé la mort dans une embuscade érigée sur l’axe Say-Tamou dans la région de Tilaberi à l’ouest du Niger où une dizaine d’autres ont été blessés. Actuellement 6 soldats des FAN sont prisonniers des islamistes EIGS.
Dans les localités de la région de Maradi, où elles sévissent, des bandes armées se livrent à des actes de banditisme dont des prises d’otages.
L’érection des embuscades et la pose des engins explosifs improvisés sont également enregistrées dans l’Est du pays, de la part du groupe Boko Haram et l’Etat Islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP). Il y a quelques jours, la menace a monté d’un cran dans cette contrée, suite aux attaques meurtrières menées par ces groupes contre des civils sur l’axe Mainé-Soroa Djiffa. Une escorte militaire sur l’axe en question a dû être déployée sur les lieux par les autorités.
La partie nord-est du Niger, n’est non plus épargnée par les affrontements. On y assiste à l’émergence de plusieurs groupes rebelles brandissant des revendications d’ordre politique, portant essentiellement sur le départ de la junte du pouvoir et un rétablissement rapide de l’ordre constitutionnel. Il s’agit entre autres, du Front Patriotique de Libération (FPL), le Front Patriotique pour la Justice (FPJ) et le Conseil de la République pour la Résistance (CRR).
Le kidnapping du préfet du département de Bilma et des militaires de sa délégation revenant d’une mission à Dirkou le 21 juin 2024 a été revendiqué par le FPL, tout comme le sabotage du pipeline Niger-Benin dans la région de Zinder le 16 juin.
Evasion des prisonniers de Koutakalé au Niger
Le 11 juillet, vers 16 heures, une évasion de prisonniers dont des terroristes et des criminels de grands chemins, s’est déroulée dans la prison de Koutakalé. L’événement s’est produit suite à une révolte lancée par trois détenus affiliés à l’EIGS. Parvenus à maitriser une sentinelle et à s’emparer de son arme, ces derniers ont semé la panique parmi les gardiens de cette prison, réputée hautement sécurisée, située au nord-ouest de Niamey et gardée par une unité de la garde nationale.
Appelés en renfort, les FDS n’ont pu débarquer sur les lieux que deux heures après. De nombreux détenus sont ainsi parvenus à s’échapper. Un garde est tué et deux sont blessés au cours du mouvement, par des prisonniers rebelles.
Vers une possible révolte de l’armée ?
A en croire des sources dignes de foi, l’ex-président Issoufou exercerait une influence certaine sur le Gal Tiani. A preuve, l’ex président, sur ordre du Gal Tiani, est protégé par un détachement de 50 hommes de la garde présidentielle. Comme si cela ne suffisait pas, 5 villas de fonction au lieu d’une seule, lui sont concédées par la junte au pouvoir. Par ailleurs, de l’analyse des nominations au sommet de l’Etat nigérien, il ressort que sont nommés, beaucoup d’amis ou de proches de l’ex président.
L’armée à laquelle cette dérive n’échappe pas, ne voit pas d’un bon œil ce qu’on qualifie d’ enrichissement’’ de la junte et ses proches. Une rumeur circulant au sein de l’armée nigérienne, prête au major col Salissou, ministre de l’équipement, de s’offrir nouvellement, une villa grâce aux pots de vin provenant des entrepreneurs, en échange de l’attribution d’un marché. Au sein des unités opérationnelles de l’armée, une telle rumeur suscite des commentaires moins élogieux à l’encontre de la junte. Sur le sujet, le mutisme de la junte et son refus tacite d’ouvrir une enquête visant l’ex président Issoufou, sont perçus comme des ingrédients d’une prochaine mutinerie au Niger.
La persistance de l’insécurité au Mali.
Au pays d’Assimi Goita, la situation est également loin d’être rose. La junte est sans cesse confrontée à des affronts multiformes des bandes armées. Le 24 juillet 2024, le village de Dembo de la commune rurale de Dimbai, a essuyé une attaque des Islamistes du JNIM soldée par 25 morts et un blessé parmi les habitants. Avant de s’enfuir, les assaillants ont pu déclencher des incendies.
Quelques jours avant, le dimanche 21 juillet 2024, une patrouille de plus de 50 motos FAMA a encerclé un hameau peuhl proche de la localité de Sarango (cercle de Massina ), à la recherche de deux motos prétendument entrées dans le hameau après avoir croisé un convoi de militaires.
N’ayant rien trouvé, ils ont sommé tous les habitants de leur remettre leurs armes avant de passer à une perquisition qui, non plus, n’a rien donné. Avant de partir, ils ont mis feu au hameau. Trois hommes et un garçon de 14 ans y ont perdu la vie. Une vieille femme et son fils qui s’en sont sortis grièvement blessés ont été transportés à l’hôpital.
Dans la nuit du 18 juillet, vers 3 heures, le village de Sandaré a essuyé une attaque lancée par une centaine de Jihadistes, équipés de motos et de véhicules 4X4, causant la mort de 7 soldats des FAMA et d’un civil. La sale besogne exécutée, ces jihadistes ont battu en retraite en direction de Nioro.
Chaque jour que Dieu fait, on assiste malheureusement à des actes de violations massives des droits de l’homme, dans les pays dirigés par ces juntes sans que l’opinion internationale n’en soit informée. Contrairement à ce que les juntes au pouvoir au Niger et Mali notamment font croire à l’opinion internationale, leur règne ne garantit nullement la paix et la sécurité.
Les populations vivent dans une hantise permanente des attaques jihadistes et des exactions venant du pouvoir qui ne laisse rien au hasard quand il s’agit de semer la terreur. Eu égard au mécontentement qui s’élève de certaines caserne déjà, le pire est à redouter dans ces pays dans un proche ou lointain avenir. Sauf bien sûr si ces juntes reviennent à de meilleurs sentiments en négociant avec les entités représentatives, un nouveau contrat social. Ce qui aura le mérite de sauver la paix dans ces contrées.