Alai Koudjoukalou «Avec ou sans alternance, nous pouvons autrement construire notre pays. Tout est question de changement de mentalité. Changeons de mentalité les uns envers les autres et l’alternance viendra d’elle-même lorsqu’on s’y attendra le moins possible.»

ENTRETIEN: Alai Koudjoukalou, nouvelle Présidente du mouvement l’Union Pour l’Alternance (UPA).

Alai Koudjoukalou est la nouvelle patronne du mouvemenr Union Pour l’Alternance suite à la démission de Mr Léonce Dabi à la tête du mouvement il y a quelques jours.

Secrétaire de profession, institutrice d’école, ALAI Koudjoukalou est membre du bureau exécutif et du conseil d’administration de l’UPA, trésorière de l’UPA à sa nomination au poste de présidente par intérim de ce mouvement, membre des pionniers à la base de la création de l’UPA, militante des luttes non armées pour la justice sociale et partisane de la non violence, patriote infatigable au nom de l’intérêt national, femme activement engagée pour les luttes pacifiques et actrice convaincue d’une véritable réconciliation nationale, main de fer dans un gan de velours, esprit éclairé mû par une grandeur d’âme et doté d’un sens profond de la responsabilité. Elle est mère de deux enfants.

Dans cette interview accordée à notre site d’information linterview.info, spécialiste des interviews, celle qui conduit désormais la destinée de l’UPA donne son avis sur l’alternance. C’est le mot le plus exploité par les Togolais dans la politique, un mot aussi qui divise le plus les fils et filles de notre nation. Pour Alai Koudjoukalou, l’alternance commence par un changement de mentalité; un changement de mentalité, non seulement sur la quintessence de l’alternance, mais aussi un changement de mentalité du Togolais envers son autre frère Togolais.

Lisez plutôt l’interview.

linterview.info: Bonjour Madame ALAI!

Alai: bonjour!

linterview.info: Vous êtes la nouvelle présidente de l’UPA, mais à titre intérimaire, suite à votre nomination à ce poste à la démission de Monsieur Léonce DABI, désormais ex président depuis le 26 févier dernier. Quelles sont vos premières impressions dès l’annonce de votre nomination?

Alai: D’abord, je vous remercie de l’opportunité que vous m’avez offerte de pouvoir m’exprimer à votre micro. Cela a été une grande surprise à la fois mêlée de la fierté de pouvoir être appelée à cette responsabilité. Je n’ai pas pensé un seul instant être appelée à remplacer mon prédécesseur, le très respectable président Léonce DABI un jour, surtout d’une manière aussi prématurée. En tout cas, je ne l’ai jamais songé. Mais je rend grâce à présent parce que Dieu étant le maître de l’histoire et de la destinée humaine, il élève ou abaisse les Hommes dans la société selon parfois des facteurs qui échappent au commun des mortels.

linterview.info : Que pensez-vous de cette responsabilité, en votre qualité de femme au sein de la société togolaise?

Alai: Je pense que très peu de femmes ont le sens de l’engagement politique dans notre pays et par ricochet en Afrique en général. Je ne me suis jamais vue inférieure aux hommes et je n’ai jamais eu le moindre complexe vis à vis des tâches ou fonctions supposées réservées au hommes dans la société. Ceci étant, je trouve normal d’occuper et valablement assumer le rôle qui est mien aujourd’hui à ce poste prestigieux de présidente d’un mouvement politique aux objectifs consacrés à la question et aux solutions de l’alternance politique dans notre pays. D’ailleurs, c’est le lieu et l’occasion d’inviter les femmes de notre pays à un sens plus étendu du leadership dans tous les domaines existants, Mais surtout en politique qui demande plus d’engagement, plus de courage et de l’abnégation. C’est regrettable que très peu de femmes s’expriment sur le terrain politique au Togo. En tout cas, c’est une fierté pour moi de faire partie des exceptions.

linterview.info: Quelles sont vos projets d’avenir au regard de votre nouvelle fonction de présidente de l’UPA?

Alai: J’avais annoncé dans mon discours de prise de fonction dissoudre le conseil d’administration de l’UPA et remanier le bureau exécutif. À part cela, je pense devoir changer le nom du mouvement. L’UPA deviendra à titre provisoire le «Comité de Salut Public», en abrégé «CST». Ceci parce que la dénomination «UPA» semble constituer une menace ou une provocation belliqueuse à l’endroit du parti au pouvoir. Si notre ancien président que je viens de remplacer avait été arrêté vers fin décembre dernier, alors qu’il ne s’est ni de près ni de loin mêlé à une activité criminelle ou à une association de malfaiteurs, alors c’est que l’UPA n’était pas la bienvenue et n’était pas donc vue d’un bon œil par le pouvoir officiel. Au regard de tout ceci, j’ai jugé bon de changer le nom ou la dénomination «UPA» qui répondrait dans les jours à venir au nom d’une nouvelle dénomination. Cela sera discuté au sein de notre bureau exécutif. Si le simple mot «alternance» fait la hantise de ceux qui seraient réfractaires à tout changement dans notre pays, pourquoi continuer par créer la peur dans les esprits? Si nous voulons en toute sincérité l’alternance au Togo, nous devons rassurer ceux qui ont le pouvoir et être capables de tous les compromis possibles, pourvu que cela débouche sur une alternance pacifique où les adversaires d’hier peuvent être des amis d’aujourd’hui pour ensemble remettre le pays sur la voie du développement. Vous savez, c’est le pluralisme politique qui soigne aussi l’image des régimes politiques destinés à l’immobilisme consacré. Si le pouvoir officiel ne veut plus de multipartisme dans notre pays, il serait plus objectif de faire voter une loi dans ce sens et tout le monde sera tranquille !

linterview.info: Que pensez-vous de ceux qui affirment que l’UPA serait devenue, depuis l’arrestation de son ancien président, un leurre de plus, une sorte de mouvement transfuge aux bottes du pouvoir officiel?

Alai: c’est l’habitude du togolais ! Cela n’est pas si étonnant ! Quand les gens ont une conception figée dans des normes rigides et fermées de l’alternance politique du pouvoir, il serait raisonnable de constater que des étiquettes vous soient injustement portées à un moment de votre lutte pour l’égalité et la justice sociale. Des gens chient et urinent dans le sable à la plage, violent les feux tricolores, jettent des ordures dans les caniveaux des routes, stationnent aux feux tricolores leurs voitures ou motos sur le passage clouté réservé aux piétons, insultent des personnes âgées comme dernièrement le cas «gogoligo» envers l’ancien archevêque de Lomé ou les diatribes de l’archevêque émérite à l’endroit du chef de l’État et des institutions de la république…. au nom de l’alternance politique et c’est vraiment triste et regrettable. Les gens pensent que tous les problèmes du Togo viennent d’une absence d’alternance du pouvoir, alors que cela n’est pas évident. L’alternance politique n’est qu’une goûte d’eau dans le vaste océan des difficultés que nous avons au Togo. L’alternance politique ne va pas résoudre tous nos problèmes de sous-développement. Nous devons prendre conscience du civisme et chercher à faire du bien autour de nous. En Europe par exemple, le piéton est roi sur la route. Tout automobiliste ou motocycliste a l’obligation de s’arrêter à cinq mètres environ du piéton quand celui-ci traverse la voie. S’il ne le fait pas, il sera puni et amendé par la loi. Ici au Togo, les gens s’en foutent allègrement! en Hollande par exemple, si vous avez une fleur ou un arbre devant votre maison, vous avez l’obligation civique de l’entretenir, le soigner, tailler les feuilles ou les fleurs selon que c’est un arbre ou une fleur ! Si vous ne le faites pas, vous serez purement et simplement amendé après avoir été averti par les agents de la municipalité. Et c’est ainsi que les européens prennent soin de leurs villes et pays pour le bien-être et le mieux-être de leurs populations. Ici au Togo, on attend bizarrement l’alternance avant de le faire, et cela est très dommage! Mais il faut dire que nos autorités municipales au Togo ne sont pas pour autant exonérées de leur part de responsabilité concernant la question ! Combien coûteraient par exemple des poubelles publiques en plastiques pour en pourvoir nos villes ou communes respectives ! Pratiquement rien! Pourtant les maires préfèrent empocher l’argent pour se taper de grosses voitures de prestige au détriment des populations de leurs communes. Et paradoxalement, on attend l’alternance politique dans notre pays avant de poser des actes civiques dans le sens du développement national. Avec ou sans alternance, nous pouvons autrement construire notre pays. Tout est question de changement de mentalité. Changeons de mentalité les uns envers les autres et l’alternance viendra d’elle-même lorsqu’on s’y attendra le moins possible.

linterview.info : Votre mot de fin.

Alai: L’UPA (Union Pour l’Alternamce) qui bientôt s’appellera autrement, change en dénomination mais pas avec ses idéaux. L’alternance, avec le temps, indubitablement adviendra. C’est une illusion de penser que l’alternance est une illusion. Alors, l’UPA constitue, à la lumière de ses idéaux, l’unique facteur sur lequel le pouvoir, le peuple et l’opposition pourront compter pour une alternance politique pacifique au Togo. Nos statuts en sont garants et nous mettons au défi tous les courants politiques de notre pays à ce sujet. Nous savons aussi que la France a joué un rôle obscur dans la disparition du président Sylvanus au Togo et l’UPA se fait le devoir et se porte garant de s’imposer un silence de l’histoire sur le sujet pour rassurer les mauvais acteurs de l’histoire de notre pays qu’ils n’ont rien à craindre face à la justice à l’avenir.

Notre ancien président a été arrêté et gardé pendant 14 jour, environ en détention préventive. Pour ceux qui l’ignorent, il a été relâché les mains vides et n’a pris aucun engagement vis à vis du pouvoir officiel avant d’être relâché. Sa vie n’a changé en rien, car il vit toujours en location et continue de marcher à pieds pour ses courses en ville, contrairement aux vrais transfuges du pouvoir qui vivent dans le grand luxe avec un train de vie enviable. Monsieur DABI semble, certes, avoir changé de paradigme depuis son retour après son arrestation, mais cela n’est nullement la preuve qu’il ait rejoint la mouvance présidentielle. Pour mémoire, Mandela est allé en prison sur un ton de guerre, mais il n’a découvert la paix que derrière les barreaux.

Pour finir, j’annonce la création d’une nouvelle page facebook de notre mouvement sous sa future nouvelle dénomination. Cette page servira de tribune libre d’expression pour tout le monde, aussi bien les acteurs politiques que leurs militants, du citoyen lamba aux responsables religieux, des mouvements sociaux aux organisations de la société civile… Par une telle tribune et un tel projet, la parole sera donnée à tout le peuple, même aux membres de la diaspora togolaise afin que chacun puisse formuler ses doléances et porter ses requêtes vers les horizons d’un Togo nouveau où il fait bon vivre.

lnterview.info: Merci Madame ALAI !

Alai: Je vous en prie! C’est moi qui vous remercie !

Interview réalisé par Narcisse Prince Agbodjan

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